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Jane Hervé, le gué de l'ange

poésie des images et des lettres

"LA HULOTTE" QUI FRÉQUENTE LES MOINEAUX

La Hulotte, numéro 111. Des moineaux.
La Hulotte, numéro 111. Des moineaux.

La Hulotte, numéro 111. Des moineaux.

Hier, j’ai fait escale sur un banc de la place Adolphe Chérioux, sac à commission cloué au sol. Au milieu du brouhaha enfantin, j’ai vu se poser à mes pieds un tout petit oiseau, plus petit qu’une petite main. Un moineau !  Bah, c’est ba…nal. J’étais pourtant émerveillée. Un évènement. Voici plusieurs années que je n’en voyais plus à Paris, alors qu’ils étaient jadis si nombreux. Agitations, pépiements, gaietés, froufroutements d’ailes,  ces picoreurs de miettes dans la paume des mamies habitaient la ville.  A moi, ils me manquaient ces micro-parisiens poids plume, décimés par le manque d’insectes. L’urbanisation galopante avait limité les cavités à nid, la pollution et  le réchauffement climatique avaient rendu le quotidien pénible, etc. Ce moineau, certes solitaire, était un rescapé, un survivant modeste. Il s’est envolé sur-le-champ. Ai-je rêvé ? Cherchait-il une partenaire ? Les moineaux reviennent-ils donc ?  Qui sait ?

Le pierrot de la Hulotte

Si bien que recevoir et consulter  la revue La Hulotte et son numéro spécial sur le « pierrot amoureux » tombait vraiment à pic. Car « Pierrot » est ni plus ni moins le surnom du moineau domestique.  Mon fameux moineau d’hier. C’est quoi, direz-vous, cette jolie « Hulotte » ! Non, ce n’est pas la nièce de Jacques Tati ; non ce n’est pas l’épouse de Nicolas.

La Hulotte fut jadis la seule revue,  adulée par les  post soixante-huitards, à traiter du monde animal. Un mythe ambulant, celui du « journal le plus lu dans les terriers ».  On l’aimait. On l’estimait. Elle était faite par une seule personne (Pierre Déom)  au fin fond d’une province (les Ardennes) dans un village de 110 habitants (Boult). Elle se caractérisait par des récits et  dessins d’une grande finesse. Ma copine Magali avait alors une grande estime pour cet oiseau de papier et archivait volontiers ses numéros.

Cette Hulotte, surnommée « Madame Je sais tout » aux yeux écarquillés, était rédigée par un Monsieur Je sais tout, explorateur  secret et érudit de la vie des animaux sauvages, des arbres et  même des fleurs d’Europe.  C’était à l’origine (n°1 en 1971) un « support pédagogique » à l’attention des enseignants, des élèves et des naturalistes.  Elle était même ronéotypée : un autre temps, un autre monde.  Elle exigeait alors un sacré travail : 1 600 heures de travail pour un faucon pèlerin. Des positions déjà  écolos : anti-pesticides et anti-chasse. Déjà.

Aujourd’hui La Hulotte est « la pipelette de la forêt ». Vu la longévité présente de l’humanité, elle s’adresse désormais aux lecteurs de 7 à 107 ans ! Sans préciser le nombre d’abonnés (1) qui adhérent encore  à cet âge ultime. Elle garde sa délicatesse, sa sobriété en noir et blanc, sa volonté délicieusement terre à terre de raconter la vie des animaux, des fleurs et des arbres. Documentée comme auparavant avec la même démarche encyclopédique des bois et des champs, elle raconte le monde animal en l’analysant à la lorgnette humaine, introduisant volontiers la drôlerie dans le savoir. Elle garde son charme, même confrontée à  la prolifération des opuscules et revues animalières new look, BD ou documentaires TV très effets spéciaux. Elle  veut s’adresser aussi bien aux enfants qu’aux parents (au reste, 100 premiers numéros sont disponibles avec  des dessins à la plume à faire envie à un esthète japonais !

Elle mue l’oiseau en personnage de roman vrai : Pierrot-la brocante rafistole volontiers son nid, parfois même il récupère la bourre des filtres des mégots,  il vit en bande dans sa jeunesse, etc. La pédagogie incite à réfléchir en posant des énigmes. Du genre : pourquoi le curé refuse-t-il de bénir le mariage des moineaux ?  Les moineaux connaissent-ils « la donation au dernier vivant » ? Comment le moineau se fait-il ouvrir la porte des cafétérias sans l’autorisation des patrons ? Non, je ne répondrai pas. ..

Mes découvertes pourtant dans cette Hulotte là… Premièrement, ce pierrot amoureux joue parfois au coucou : en Espagne, il s’installe carrément dans le nid des cigognes et en France dans celui des hirondelles ! Deuxièmement, en février-mars, ses testicules grossissent cent fois !!! A faire frémir Batman.

Jane Hervé
 

(1) La revue fonctionne sur abonnement. La Hulotte, 8 rue de l'Église, CS 70002, 08240 Boult-aux-bois.               Téléphone 03 24 30 01 30

Site www.lahulotte.fr

 

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